Des manifestations ne viennent pas à bout par elles-mêmes d'une guerre donnée, ni ne corrigent une injustice profondément enracinée. Face aux horreurs du monde, on peut aisément se laisser aller à l'équivalent non-violent de la bataille – se lancer dans une action ou une activité sans prendre de recul ni considérer l'avenir. Les groupes passent souvent trop directement de l'identification d'un problème au choix d'une tactique. À moins que nous ne soyons atteints d'« analyse paralysante », toujours en phase de formation pour nous-mêmes et pour les autres, mais ne passant jamais à l'action et n'atteignant jamais non plus, par conséquent, nos objectifs. La force d'une campagne non-violente naît de l'association créative de la tactique, de la réflexion stratégique et de l'implication des participant/e/s.

Une campagne, autrement dit l'enchaînement d'une suite d'activités et d'actions menées sur une période donnée en visant des objectifs spécifiques et définis, est généralement nécessaire pour contribuer au changement sur une question précise. Les campagnes sont lancées par un groupe de personnes ayant une préoccupation commune. Les participant/e/s développent une compréhension et une vision communes, cernent les objectifs et amorcent un processus de recherche, d'éducation et de formation qui conforte et élargit le nombre des participant/e/s s'engageant dans les activités et dans l'action.

Une campagne poursuit des objectifs à différents niveaux. À la base se trouve la demande propre, ou l'objectif affiché, de la campagne. De nombreuses campagnes visent les lignes de conduite des gens placés au sommet de telle ou telle hiérarchie. Pour atteindre cette cible, il nous faut introduire un nouveau facteur dans leurs critères de décision – que ce soit en les persuadant par de nouvelles informations, en convainquant les personnes du soutien desquelles ils dépendent, ou en les prévenant de la résistance qu'ils devront affronter. Nous ne les traitons pas comme des ennemis, mais comme des adversaires – des gens qui doivent être freinés ou déplacés afin que puisse être mis un terme à une injustice donnée.

Une campagne a aussi des objectifs internes, comme le renforcement progressif de la capacité et du nombre des participant/e/s. Une campagne non-violente conduit les personnes à travers des processus d'autonomisation, ce qui inclut l'autonomisation personnelle (les personnes découvrant et exerçant leur propre pouvoir contre l'oppression, l'exclusion et la violence et en faveur de la participation, la paix et les droits humains) et la construction d'un pouvoir collectif. Au cours de ce processus, les groupes apprennent à être des organisateurs et deviennent des stratèges politiques.

Les campagnes doivent aussi transmettre un aperçu de ce que nous visons, en conduisant ainsi à des campagnes ultérieures qui mettront en cause les structures existantes du pouvoir. Bien des campagnes peuvent nous ouvrir la voie de l'autonomisation sociale menant à la transformation sociale pour laquelle nous travaillons. Dans notre formation et nos plans d'action, il nous faut prendre en compte tous les aspects de ce processus d'autonomisation sociale non-violente : l'autonomisation personnelle, le pouvoir du groupe, le pouvoir populaire.

Pour élaborer une stratégie non-violente efficace, il nous est nécessaire de développer des compétences pour penser notre stratégie.

Élaborer des stratégies efficaces

Les campagnes créatives sont la clé pour explorer le potentiel de la non-violence. Et c'est quand le pouvoir et les possibilités d'une campagne non-violente stimulent un groupe que celui-ci est le plus susceptible d'élaborer une stratégie de campagne efficace. Les exercices suggérés plus avant peuvent contribuer à faire naître enthousiasme et excitation ; ils présentent aussi des suggestions pour rendre les campagnes efficaces, ainsi qu'une approche permettant de comprendre comment le changement a lieu.

Si vous travaillez pour le changement social dans votre environnement proche, vous pouvez souhaiter entreprendre un processus de groupe afin de préparer une stratégie efficace pour aller dans la direction d'un tel changement. Un processus de groupe endosse les ressources déjà présentes dans le groupe et peut générer enthousiasme et implication.

Dans un premier temps, vous pourrez souhaiter que le groupe partage sa propre connaissance des campagnes, en ayant recours à l'exercice « Stratégies 10/10 » (p. ) ou en menant une discussion sur la façon dont le changement arrive, en demandant aux participant/e/s de quelles campagnes efficaces elles/ils ont entendu parler et ce qui les a rendu efficaces. Dressez une liste à partir des réponses. Les études de cas (voir « Guide d'études de cas de campagnes », p. ) sont une autre façon d'apprendre à partir de ce qui a été fait dans le passé. Elles ne livrent pas de plans d'action, mais elles montrent la détermination, la débrouillardise et la patience à l'œuvre lors de campagnes non-violentes réussies. Vous trouverez au chapitre des Ressources (chapitre 11) des films et des livres relatant des campagnes non-violentes ; vous pouvez utiliser également certaines histoires racontées dans ce manuel ou sur les sites Web indiqués.

Si votre groupe possède déjà de grandes connaissances en la matière, que vous disposez d'un temps limité ou que quelque autre facteur rend infaisable ce genre de révision historique, vous pouvez bien sûr élaborer directement votre propre processus pour définir une stratégie pour le changement couronnée de succès. Afin d'élaborer des stratégies efficaces, un processus utile est le suivant : – identifier et décrire le problème/la situation ; – analyser les raisons pour lesquelles il/elle existe ; – formuler une vision de ce que vise le groupe, en fixant des objectifs clairs ; – et enfin élaborer une stratégie pour atteindre ces objectifs. Ces étapes sont expliquées ci-après. Identifier et décrire le problème

Pour les nombreuses personnes confrontées à des problèmes dans leurs vies quotidiennes, décrire et analyser ceux-ci fait naturellement partie du processus même de la vie. Mais, pour d'autres personnes, cette démarche doit être plus intentionnelle. Les présentes étapes visent à aider les participant/e/s à avancer ensemble dans un processus inclusif et non hiérarchique, pour une compréhension plus profonde des stratégies non-violentes efficaces.

Identifier ou décrire le problème ou la situation peut sembler être une étape trop simple pour certains mais, si ce travail n'est pas mené collectivement, les participants peuvent partir de suppositions différentes, ou de descriptions différentes, et formuler de ce fait des messages et des objectifs différents. Et il est impossible d'analyser quoi que ce soit si l'on n'est pas clair à propos de la chose même que l'on analyse. Suivre ensemble un tel processus affermit la participation de chaque individu tout en développant l'action collective.

(Flecha) Exercices :Tout au long du processus stratégique de réflexion et de planification, un groupe peut choisir d'utiliser soit « L'arbre » (p. ), soit « Les piliers du pouvoir » (p. ), en fonction de ce qui paraît mieux adapté à la question en litige et au groupe lui-même. Analyser pourquoi le problème existe

Pour transformer une situation problématique, il nous faut comprendre pourquoi elle existe et qui potentiellement l'entretient ou lutte contre. Nous devons analyser la structure de pouvoir afin d'y déceler des points d'entrée pour la résistance, le travail constructif, etc.

Une analyse devrait prendre en compte les questions suivantes : – Comprenons-nous le contexte et les causes profondes du problème ? – Qui en tire bénéfice, qui en souffre et de quelle façon ? – Qui détient le pouvoir, et qui a le pouvoir de générer le changement ? (Qui fait partie des structures soutenant tout cela ? Qui s'y oppose ?) – Y a-t-il une différence entre les rôles qu'y jouent les femmes et les hommes ? (Voyez aussi le chapitre 3, « Genre et non-violence ».) – Quelles sont les forces, faiblesses, chances et risques d'une campagne destinée à changer la situation ? (Analyse FFCR.) – Sur quelles théories faisons-nous reposer cette analyse ? – Dans quelle mesure notre adhésion au changement social non-violent affecte-t-elle notre analyse ?

(Flecha) Exercices: Utilisez encore « L'arbre » (p. ) ou « Les piliers » (p. ). Pour étudier plus en profondeur celles/ceux qui soutiennent la structure ou qui s'opposent à elle, utilisez l'exercice « Spectre des alliés » (p. ) qui nous aide à identifier et analyser l'ensemble des parties prenantes, nos alliés et nos adversaires, et contribue à adopter des décisions stratégiques en fonction de celles/ceux que nous voulons faire bouger.

Formuler une vision de ce que nous voulons

Pour aller de l'avant, une campagne doit avoir une vision de ce qu'elle veut, faute de quoi les actions peuvent devenir de simples réactions, des protestations dont il est aisé de ne tenir aucun compte. Il est vraisemblable qu'une vision inclue des objectifs ambitieux à long terme. Cela vaut la peine de demander aux groupes de débattre de leur vision des grandes questions : la paix universelle, la justice économique, la société à laquelle nous aspirons. Toutefois, le défi est alors d'identifier les premières étapes de ces longs voyages : les objectifs à court et moyen terme qui mènent à ces objectifs à long terme. Les campagnes se heurtent à des dilemmes au moment de définir les objectifs. Pour obtenir le plus large soutien possible, une campagne pourrait choisir comme « plus petit dénominateur commun » un objectif à court terme – autrement dit, un point susceptible de rassembler un large éventail de personnes. Cependant, si les implications ne vont pas au-delà, si la chose ne suggère pas d'autres étapes vers la transformation sociale, tout changement qui en découlerait risque fort d'être futile et frustrant. En même temps, il est improbable que des objectifs utopiques et qui ne paraissent pas réalistes mobilisent qui que ce soit, à moins qu'y soient associés des objectifs intermédiaires plus accessibles. Lorsque les visées ultimes sont révolutionnaires, les campagnes se doivent de définir des étapes progressives, limitées mais plus acceptables.

Points à considérer lorsque l'on élabore les objectifs : – Les objectifs sont-ils réalistes ? Le temps nécessaire pour les concrétiser peut-il être déterminé ? – Les gens vont-ils croire qu'ils peuvent atteindre cet objectif ? – L'objectif correspond-il aux intentions et à la capacité du groupe ? – Les objectifs peuvent-ils être mesurés ? Saurons-nous à quel moment nous les aurons atteints ? – Les objectifs ont-ils une importance pour la vie des gens ? Cela les poussera-t-il à participer à la campagne ? – Les gens se sentiront-ils plus autonomes grâce à la « victoire » ?

(Flecha) Exercices: Préparez un arbre sain – Utilisez les questions de l'exercice « L'arbre » (p. ). Pouvons-nous répondre positivement aux questions ci-dessus ? – « Les piliers du pouvoir » (p. ). Quels sont les objectifs à court et à moyen terme qui affaiblissent les piliers ? Que cherchons-nous à faire grâce aux principes sous-jacents ? Pouvons-nous répondre positivement aux questions ci-dessus ? (Pour plus d'information sur les messages, voyez aussi « Émission de messages » dans « Le rôle des médias », p. , et « Envoyer le message de protestation », p. ).

Élaborer une stratégie

Une fois que vous avez décrit et analysé le problème, que vous avez une vision de ce que vous voulez et des objectifs vers lesquels vous diriger, il vous faut élaborer une stratégie – un plan – pour y parvenir. L'élaboration d'une stratégie ne se fait pas en une seule réunion ni n'est l'œuvre d'une seule personne. C'est un processus de prise de décision, d'organisation, de mobilisation et d'élaboration de stratégies créatives.

Les lignes qui suivent présentent les éléments fondamentaux d'une campagne non-violente. Les « Histoires et stratégies » (chapitre 8) décrivent la façon dont nombre de ces éléments ont été utilisés dans le cadre de campagnes.

Éléments d'une campagne

Les points suivants peuvent vous aider, vous et votre groupe, dans le processus d'élaboration d'une stratégie de campagne. Vous devez, vous et votre groupe, réaliser ce travail sur un fondement existant, pas seulement au début d'une campagne. Ce manuel contient de nombreuses ressources pour vous aider tout du long de ce processus.

Compréhension commune

Existe-t-il une compréhension commune du problème ou de la situation existants ? Avons-nous analysé les raisons pour lesquelles il ou elle existe ? Notre analyse inclut-elle les structures sociales, économiques et politiques ? Avons-nous une compréhension commune du sens qu'il y a à mener une campagne non-violente ? Sommes-nous convenus d'un processus de prise de décision ?

Discipline non-violente

Les organisatrices/-teurs ont-elles/ils débattu et accepté les principes non-violents ? Des lignes directrices non-violentes existent-elles ? Ont-elles été clairement spécifiées afin d'être comprises par tous ? (Voyez « Principes de l'action non-violente », p. , et « Lignes directrices non-violentes », p. ).

Recherche et collecte d'informations

Que savons-nous, et qu'avons-nous besoin de savoir ? Recherchons-nous la vérité ou essayons-nous seulement de « nous donner raison » ? Qui peut trouver l'information dont nous avons besoin ? Qui peut nous orienter et nous indiquer des ressources ? Découvrir ce que les autres pensent de la question fait partie du travail de recherche. Les enquêtes collectives de projets d'écoute (voyez http://www.listeningproject.info/) sont un des moyens d'y parvenir. Les projets d'écoute (Listening Projects) aident les militant/e/s à se pencher plus en profondeur sur une question, en rassemblant des informations sur lesquelles fonder ultérieurement une stratégie tout en développant les liens entre les personnes interviewées et les auditrices/-teurs. De tels projets ont été menés au Cambodge, en Croatie, en Afrique du Sud et aux États-Unis d'Amérique.

Éducation

L'information est-elle compréhensible pour les personnes que nous cherchons à atteindre ? L'un des rôles des militant/e/s non-violent/e/s est de donner à la recherche une forme lui permettant d'être largement utilisée dans le cadre d'une campagne, ou d'accompagner les personnes dans une telle démarche. Avons-nous recours à l'éducation populaire et aux processus de conscientisation ? Avons-nous développé de bons matériels éducatifs, appropriés aux différents publics et alliés que nous voulons atteindre ? Quels autres moyens éducatifs pouvons-nous utiliser (par exemple, le théâtre de rue) ? Comment nous servons-nous des médias pour élargir la connaissance de la question ?

Formation

Avons-nous besoin d'une formation pour apprendre les techniques d'élaboration stratégique et d'organisation (par exemple, processus de goupe, planification stratégique, travail avec les médias) ? Offrons-nous une formation pour préparer les personnes à l'action non-violente ? La formation est-elle accessible à tous ? Nos formations prennent-elles en compte la dimension de l'oppression ? Comment intégrons-nous celle-ci à la fois dans un contexte sociétal et à l'intérieur de nos groupes et modes de relation ? (Voyez le chapitre 4, ainsi que les exercices « S'exprimer », p. , et « Un dialogue genré pour bâtisseuses/-eurs de paix », p. ).

Alliés

Qui sont nos alliés ? Qui pourrait devenir nos alliés ou nos partisans si nous échangeons plus avec elles/eux ? Comment entrons-nous en contact et établissons-nous des relations de coopération avec des groupes en compagnie desquels nous souhaitons travailler en coalition ? (Utilisez le « Spectre des alliés », p. , un exercice destiné à identifier des alliés potentiels.)

Négociation

Avons-nous clairement défini avec qui nous souhaitions négocier ? Comment allons-nous communiquer avec elles/eux ? Sommes-nous claires dans nos demandes ? Est-il clair pour nous que nos objectifs ne sont pas d'humilier notre adversaire mais de travailler à une solution pacifique ?

Travail constructif/Institutions alternatives

Gandhi considérait le programme constructif (voyez « Programme constructif », p. ) comme le début de l'édification d'une nouvelle société, même dans la carcasse de l'ancienne. Élément-clé du changement social, il est conçu pour correspondre aux nécessités d'une population (par exemple, l'égalité économique, l'unité communale, le développement d'industries locales) et pour développer la communauté elle-même. Le travail constructif est souvent absent des campagnes à l'Ouest, tandis qu'il est mis en vedette à l'Est. Une chose est de dire « non » face à l'injustice, mais comment dire « oui » ? Comment commençons-nous à construire la vision de ce à quoi nous travaillons ?

Des institutions alternatives peuvent être des créations provisoires, comme la mise en place d'un transport alternatif durant le boycott d'un réseau d'autobus appliquant la ségrégation/l'apartheid. Action législative et électorale

L'action législative ou électorale fait-elle partie de la campagne, à titre de tactique éducative ou comme un objectif ? Comment ferons-nous pression sur les politicien/ne/s ? Comment exercerons-nous notre pouvoir ? Comment les personnes participeront-elles à cette action ? Quels sont nos plans si nos objectifs ne sont pas atteints ?

Manifestations

Quelle est la meilleure façon de manifester nos préoccupations ? Avons-nous envisagé les nombreuses méthodes de l'action non-violente ? (Voyez « Formes d'action », p. .) Les objectifs propres à la manifestation sont-ils clairs à nos yeux ? Comment nous aideront-ils à atteindre nos objectifs de campagne ? Comment impliquerons-nous les « spectatrices/-teurs » ? Nos actions auront-elles un sens aux yeux du voisinage ?

Action directe non-violente/Désobéissance civile/Résistance civile

Avons-nous fait tout ce que nous pouvions pour nous assurer d'un soutien à notre action ? Celle-ci favorisera-t-elle une plus grande implication du voisinage ou sera-t-elle contre-productive de ce point de vue ? Fera-t-elle avancer notre cause ou ne sera-t-elle pas plutôt une fin en elle-même ? Nos objectifs sont-ils clairs ? Le type de pression exercée sur nos adversaires les poussera-t-il à bouger ? Sur qui cette pression s'exercera-t-elle ?

Dans sa Lettre d'une prison de Birmingham, Martin Luther King a écrit : « Vous pouvez bien demander 'Pourquoi l'action directe ? Pourquoi des sit-in, des marches, etc. ? La négociation n'est-elle pas une meilleure voie ?'. Vous avez tout à fait raison d'en appeler à la négociation. De fait, c'est le dessein même de l'action directe. L'action directe non-violente vise à faire naître une telle crise et à établir une telle tension créative qu'un collectif ayant constamment refusé de négocier soit forcé d'affronter une question. Elle vise donc à mettre en scène le fait que la chose ne peut plus être ignorée. »

Flecha Exercice : écrivez cette citation sur un tableau mural. Demandez au groupe d'identifier la crise, la tension créative et le collectif, et de dire comment cette question peut être mise en scène dans sa propre campagne. Voir aussi « Niveaux d'escalade », p. .

Réconciliation

« En tant que voie pour prendre part à un conflit, la non-violence essaie parfois d'y introduire la réconciliation : en consolidant la fabrique sociale, en autonomisant celles/ceux qui sont en bas de la société et en rassemblant des personnes de différents bords pour chercher une solution » (IRG, « Déclaration de principes »). Avons-nous œuvré à une situation gagnant-gagnant, plutôt que gagnant-perdant ? La réconciliation est-elle publique ou privée ? (Lors de certaines campagnes non-violentes, couronnées de succès, du mouvement pour les droits civils aux États-Unis, des hommes d'affaires blancs demandèrent que l'intégration des Afro-Américains soit effectuée sans avis public pour éviter une réaction négative, tandis qu'il y eut ailleurs des manifestations publiques de désagrégation du système.)

Célébration

Lorsque nous atteignons nos objectifs, prenons le temps de reconnaître ce que nous avons fait et de célébrer nos acquis. Il nous arrive d'aller au-delà de nos objectifs, ou d'en réaliser d'autres, et de ne pas prendre le temps de le comprendre. L'évaluation collective est vitale ; en documentant nos réussites et nos échecs, en partageant notre expérience avec d'autres, nous disposerons de sources où puiser lorsque nous prendrons la route vers notre prochain objectif. Si des militant/e/s-clés sont fatigués ou « grillés », elles/ils peuvent ne pas voir les acquis. Certains caractères compulsifs peuvent aussi ne pas admettre qu'une campagne soit dans une impasse ; il se peut qu'il faille leur donner un coup de main pour qu'ils comprennent que le meilleur moment, lorsque l'on se tape la tête contre un mur de brique, c'est celui où l'on arrête de le faire.

Évaluation

Beaucoup de choses doivent être prises en compte quand on élabore des campagnes stratégiques non-violentes. Il faut apprendre à penser stratégiquement, à développer notre compréhension du pouvoir de la non-violence, et à franchir les étapes susceptibles de nous mener efficacement à nos objectifs. Tout cela contribuera au passage à renforcer et à autonomiser notre groupe. Il est important d'évaluer notre campagne, pas seulement à la fin mais aussi quand elle est en cours. Si nous ne le faisons pas, nous pouvons commettre des erreurs que nous reconnaîtrons seulement quand il sera trop tard. Il faut prêter l'oreille à toute personne impliquée dans l'action. Conserver une trace de nos réunions, de nos décisions et de notre travail deviendra le fondement même de l'étude de notre propre cas. Que nous ayons réussi ou non, nous pouvons apprendre de notre expérience. Et c'est un élément crucial pour que nous puissions partager nos stratégies et nos histoires.

(Asterisco) Voyez « Évaluation de l'action », p. , et « Guide d'études de cas de campagnes », p. .